Centre Anti-Huissiers
Mémorandum
Des actes " saisissants ":
les dérives chez les huissiers de justice.
Bonjour,
Vous trouverez ci dessous un Mémorandum à propos
"des dérives dans les pratiques des huissiers de justice".
Ce Mémorandum m'est parvenu via Thierry MARTIN, Président
de l'ASBL DIGNITAS
qui a soutenu ce projet et qui nous a fait part de ces informations,
merci à Dignitas... :)
Pour le Centre Anti-Huissiers il apparaît que cette démarche
est puissante, ainsi que les différents soutiens qui adhèrent
à ce Mémorandum et le cautionnent. Bravo et merci
pour cet action que le CA-H soutien par le coeur n'étant
pas une ASBL, sans quoi le CA-H y aurait souscrit volontiers.
Il est temps, en effet, que les autorités prennent leurs
responsabilités et actent à leur tour les conseils
avisés des gens de terrain, pour le profit de tou(te)s.
Si vous souhaitez le document tel que je l'ai reçu, cliquez
ici, il est sous Word (format .rtf, environ 160 Ko).
Mémorandum
Des actes " saisissants
":
les dérives chez les huissiers de justice
|
Coordination :
Verbruikersateljee
Organisation :
CAW Archipel
Dignitas
Grepa
CRIOC (Centre de Recherche et d'Information des Organisations
de Consommateurs)
Vlaams Centrum Schuldbemiddeling
Vlaams Netwerk van Verenigingen waar armen het woord nemen
Welzijnszorg
Soutien :
Magda De Meyer (sp.a)
Tom Dehaene (CD&V)
Karine Lalieux (PS)
Zoë Genot (Ecolo)
Avril 2007
I. Introduction :
Ces dernières années, les associations de lutte
contre la pauvreté et les organisations d'aide aux personnes,
telles que les services de médiation des dettes, constatent
de plus en plus de dérives dans les pratiques des huissiers
de justice. Il s'agit tant de comportements liés au recouvrement
amiable (le plus souvent des lettres de rappel) que de certains
agissements lors de la saisie de biens. Bien que beaucoup d'huissiers
soient conscients des problèmes et réalisent qu'il
serait utile
daméliorer leur image, les changements sur le terrain
restent limités.
Ces plaintes ne sont pas nouvelles et ont déjà été
signalées à plusieurs reprises. Ainsi, le Vlaams
Centrum Schuldbemiddeling a encore regroupé, fin 2006,
quelques plaintes récurrentes pour les transmettre à
la Ministre de la Justice, à la Chambre Nationale des Huissiers
de Justice de Belgique et aux chambres d'arrondissement (les organisations
professionnelles des huissiers de justice par arrondissement judiciaire).
Hormis la ministre, seules quatre chambres d'arrondissement ont
réagi (en général de manière formelle).
Les plaintes doivent être considérées sous
deux aspects :
Bien que les huissiers de justice soient surtout connus pour leurs
compétences classiques et légales en matière
de saisies de biens, on observe, ces dernières années,
quun nombre croissant dhuissiers procèdent
au recouvrement de sommes par voie amiable et ce, en dehors de
toute procédure judiciaire ou de tout titre exécutoire.
Cest ce quon appelle le recouvrement de dettes à
l'amiable. Les professionnels du terrain, et en particulier les
services de médiation des dettes, constatent régulièrement
en matière de recouvrement amiable des pratiques d'huissiers
de justice dont la légitimité est discutable ou
qui méritent à tout le moins un examen plus approfondi.
La saisie des biens dune personne, quant à elle,
est une mission pour laquelle les huissiers de justice disposent
dun monopole légal. Elle est de plus en plus vécue
comme une mesure archaïque. Nombre de personnes sont d'avis
que la saisie est tellement dénigrante qu'elle devrait
être évitée au maximum.
II. Quelques plaintes récurrentes
:
1. Les huissiers de justice en tant que bureaux de recouvrement
:
De nombreux huissiers de justice acceptent des demandes de clients
pour lesquelles ils procèdent au recouvrement de dettes
sans que celui-ci soit basé sur un titre exécutoire.
Ce faisant, ils sortent des missions pour lesquelles ils ont un
monopole légal et entrent en compétition avec les
bureaux de recouvrement.
Les activités extrajudiciaires de recouvrement sont réglementées
par la loi du
20 décembre 2002 relative au recouvrement amiable de
dettes du consommateur. Néanmoins, les huissiers de justice
qui se lancent sur dans cette voie du recouvrement amiable estiment
ne pas être soumis à toutes les dispositions légales
qui sont d'application pour les bureaux de recouvrement.
Sur le terrain, les pratiques suivantes sont souvent constatées
lors du recouvrement amiable de dettes par des huissiers de justice:
Dans les lettres de rappel, nous lisons presque toujours que le
non-paiement donnera lieu à une procédure judiciaire
(assignation devant le tribunal) et que les frais de cette procédure
seront à charge du destinataire de la lettre. Pourtant,
seul le juge peut condamner la partie qui est dans son tort au
paiement des frais. Compte tenu du fait que beaucoup de débiteurs
refusent de payer parce qu'ils contestent la créance, le
verdict qui résultera d'une éventuelle procédure
judiciaire nest jamais assuré.
Ex.: Dans une lettre de rappel un huissier de justice réclame
le paiement de coûts de GSM impayés (347,64 euros),
majorés des frais de mise en demeure (60,62 euros) et d'une
indemnisation. En voici un extrait:
" FAUTE DE REACTION POSITIVE, nous avons L INSTRUCTION
DENTAMER DE MANIERE IRREVOCABLE UNE PROCEDURE JUDICIAIRE
A VOTRE CHARGE. Les frais de cet acte et de ceux de lexécution
forcée dun jugement positif peuvent être estimés
à au moins 650 euros !!! "
La question est de savoir si de telles formulations ne sont pas
contraires à linterdiction de toute communication
comportant des menaces juridiques inexactes, ou des informations
erronées sur les conséquences du défaut de
paiement (art. 3, §2, deuxième tiret de la loi
du 20 décembre 2002).
Lors du recouvrement amiable de dettes, les huissiers de justice
comptabilisent à charge du consommateur des frais non négligeables,
il sagit soit de frais qui sont prévus par leurs
tarifs (ex " lettre de sommation "), soit des frais
qui ne sont même pas prévus dans leurs tarifs (ex.
"Frais bureau", "frais d'administration",
etc.). Or, il est interdit aux bureaux de recouvrement de faire
de même. En effet, la loi leur interdit expressément
de demander une quelconque compensation au consommateur autre
que les montants convenus dans le contrat sous-jacent en cas de
non-respect des engagements contractuels (art. 5 de la loi
du 20 décembre 2002). Cette disposition ne s'applique
pas aux recouvrements amiables par des huissiers de justice dans
l'exercice de leur fonction.
Ex.: L'exemple ci-dessous, repris d'une lettre de mise en demeure,
illustre à quel point le montant final peut augmenter en
ajoutant les différents frais:
Les lettres de mise en demeure contiennent souvent une énumération
de toute sorte de postes dont le débiteur ne peut pas vérifier
l'origine ni contrôler comment sont calculés ces
montants. Le plus souvent, on se limite à l'énumération
des différents postes sous des dénominations telles
que "montant principal", "intérêts",
"frais de rappel", "droits de recouvrement,
etc. Concernant les intérêts, comme les intérêts
débiteurs par exemple, il n'est pas expliqué quel
est le taux d'intérêt appliqué, ni quelle
est la période (nombre de jours) pour laquelle ces intérêts
sont calculés.
A lopposé, les bureaux de recouvrement ont l'obligation
de faire précéder le recouvrement amiable dune
mise en demeure par écrit, qui doit contenir diverses mentions
obligatoires (art. 6, loi
du 20 décembre 2002). Elle doit notamment donner une
description claire et une justification des montants qui sont
réclamés au débiteur. Cette disposition n'est
pas davantage applicable aux huissiers de justice dans le cadre
du recouvrement amiable.
Quand des huissiers de justice procèdent au recouvrement
amiable de dettes, ils utilisent leur propre papier à lettre
pour les mises en demeure. Sur l'entête de ces lettres,
il est évidemment indiqué que l'expéditeur
est un huissier de justice. Beaucoup de consommateurs sont intimidés
par cette mention. Peu de personnes savent que les huissiers de
justice ne peuvent pas recourir à des mesures dexécution
forcée (saisie) dans la phase de règlement à
l'amiable. Le plus souvent, les lettres de rappel ne mentionnent
d'ailleurs pas qu'il s'agit d'un recouvrement amiable.
Nous plaidons pour que les huissiers de
justice qui pratiquent le recouvrement amiable de dettes
soient tenus de respecter toutes les dispositions reprises
dans la loi
du 20 décembre 2002, à l'exception de
l'inscription obligatoire auprès du SPF Economie.
Cela signifie que les règles suivantes seront d'application
pour tous les huissiers de justice qui recouvrent des
dettes à l'amiable:
- Linterdiction de demander une compensation quelconque
au consommateur, autre que les montants convenus dans
le contrat sous-jacent en cas de non-respect des engagements
contractuels (art. 5).
- Lobligation denvoyer une mise en demeure
écrite au début du recouvrement amiable,
avec mentions obligatoires (comme notamment une description
claire et une justification des sommes demandées
art. 6).
- L'information obligatoire lors de visites à domicile
(art. 7).
- Le respect des dispositions de la loi
du 20 décembre 2002 par les huissiers de justice
qui pratiquent le recouvrement amiable de dettes doit
également être contrôlé par
la Direction Générale Contrôle et
Médiation du SPF Economie.
Pour conclure, l'huissier de justice doit expliquer de
manière claire au consommateur qu'il agit tout
à fait en dehors de ses missions en matière
de saisies. L'interdiction légale de créer
une confusion quant à la qualité de lintervention
de lhuissier doit être clarifiée dans
la loi.
|
2. La saisie :
Des saisies non rentables :
Lorsque les biens ont peu de valeur, le rendement dune vente
publique suite à une saisie mobilière suffira à
peine à couvrir les frais de la saisie (principalement
les frais et honoraires de lhuissier de justice). Dans une
telle situation, dun point de vue économique, toute
l'opération se révèle inutile. Ni le créancier,
ni le débiteur n'en tirent le moindre profit. Le créancier
n'obtient même pas le paiement partiel de ce qui lui est
dû. Quant au débiteur, il peut même devoir
faire face à des frais supplémentaires.
Une solution possible pourrait être de mettre à charge
du créancier le risque d'une procédure de saisie
inutile. Aujourd'hui, larticle
1024 du Code judiciaire stipule que les frais d'une procédure
de saisie sont à charge de la personne chez qui les biens
sont saisis. A lheure actuelle, le débiteur qui est
victime dune saisie inutile, disproportionnée ou
abusive doit aller en justice sil souhaite se retourner
contre lhuissier de justice ou le créancier et leur
réclamer des dommages et intérêts.
Une exception à larticle
1024 CJ pourrait être introduite pour les cas
où les frais de la saisie ne sont pas couverts par
le rendement de cette saisie. Les frais de cette saisie
" inutile " resteraient alors automatiquement
et de plein droit à charge de celui qui a demandé
de procéder à la vente, sans aucune possibilité
de réclamer ces frais plus tard. On pourrait également
penser à donner explicitement le droit aux huissiers
de justice de refuser une demande de leur client dans un
cas pareil. On devrait également favoriser le PV
de carence prévu par la loi
du 29 mai 2000 (*) portant création d'un fichier
central des avis de saisie, M.B. 9/08/2000. Il est urgent
de veiller à lentrée en vigueur de cette
loi. |
Des saisies " pression " et des saisies à
répétition :
Il nest pas rare sur le terrain de voir des huissiers procéder
à des saisies " pression " (pour utiliser le
terme utilisé par les huissiers eux-mêmes). Ces saisies
ont pour seul but dintimider le débiteur qui va chercher
à tout prix - et souvent au détriment du paiement
de son loyer ou de ses factures de gaz ou délectricité
- à éviter la vente de ses quelques biens en payant
quelque chose à lhuissier. Ce paiement couvre en
général à peine le montant des frais exposés
par lhuissier
Il nous semble donc primordial :
- de mettre fin à ce type de saisies pression en favorisant
le PV de carence dans les situations où les biens nont
quune valeur dérisoire. Dans le PV de carence l'huissier
mentionne que les biens saisissables du débiteur sont d'une
valeur manifestement insuffisante pour couvrir les frais de la
procédure. Il suffit de veiller à ce que le "nouvel"
article 1390. § 1er intégré dans le Code jud.
par la loi du 29 mai 2000 puisse enfin
entrer en vigueur ;
- de mettre fin aux saisies à répétition
(plusieurs huissiers différents viennent saisir les biens
dun même débiteur ou le même huissier
saisit plusieurs fois les mêmes biens du même débiteur)
en mettant enfin en place le fichier des saisies prévu
par la loi du 29 mai 2000. Afin déviter
laccumulation de frais inutiles tant pour le débiteur
que pour le créancier, larticle 1391 al 3 du C.J.
oblige lhuissier à consulter préalablement
ce fichier des avis de saisies avant de procéder à
une saisie des meubles.
Des actes incompréhensibles :
Les actes d'huissiers de justice sont rédigés de
manière incompréhensible :
Pas de phrases normales, mais des "constructions de
texte" qui sont parfois aussi longues que l'acte entier.
Utilisation de termes très techniques et/ou archaïques,
qui ne sont pas du tout compréhensibles pour tout un chacun
(ex. la grosse de l'acte).
Dans le recouvrement judiciaire, le calcul des frais est cryptique.
On utilise par exemple des abréviations courantes (dans
le secteur) mais dont la signification échappe totalement
au consommateur.
Ex.: Une sommation cite en dernière page en bas "Coût:
septante-deux euros et quarante-quatre eurocentimes".
Dans la marge, ces frais sont justifiés comme suit:
Combien de consommateurs savent que DF, par exemple, signifie
droit fixe ou encore ce qu'est exactement un "droit
fixe"?
Nous plaidons pour que les lettres et les actes
d'huissiers de justice soient compréhensibles pour tout
le monde. Cela peut être réalisé en rédigeant
des lettres-types et des actes-types.
Où adresser ses questions et ses plaintes
? :
Les plaintes concernant des pratiques d'huissiers de justice peuvent
actuellement être adressées aux chambres d'arrondissement.
Il s'agit là dinstances qui sont composées
par les huissiers de justice eux-mêmes. En outre, le conseil
des chambres d'arrondissement ne dispose que d'outils limités
pour sanctionner les infractions.
Vu le grand nombre de plaintes relatives à des
pratiques inacceptables d'huissiers de justice, il existe
un besoin urgent de créer un service de médiation.
Un tel service de médiation peut être installé
au sein de la Chambre nationale des Huissiers de Justice
à condition que la composition et le fonctionnement
de ce service soient indépendants et impartiaux,
et prévoient des représentants d'autres organisations
telles que des organisations de lutte contre la pauvreté
ou de consommateurs. Les abus et l'application de coûts
inutiles pourraient y être signalés et réellement
suivis et, le cas échéant, sanctionnés. |
La liste des biens qui ne peuvent être
saisis :
Larticle
1408 du Code judiciaire contient une liste des biens qui ne
peuvent être saisis. Lobjectif de cette liste est
de parvenir à un équilibre entre, dune part,
la nécessité pour les créanciers dobtenir
le remboursement des dettes qui leur sont dues, et, dautre
part, le souhait de garantir au saisi une existence conforme à
la dignité humaine.
On constate que cette disposition nest plus véritablement
adaptée à notre époque.
Si la liste actuelle mentionne encore certains biens tels qu
" une vache, ou douze brebis ou chèvres...",
elle omet par contre toute une série de biens qui sont
aujourdhui considérés comme presque indispensables
dans notre société.
Nous songeons en premier lieu à divers moyens de communications
qui font aujourdhui partie de notre vie courante. Il simpose,
dès lors, dadapter la liste de larticle
1408 du code judiciaire.
III. MEMORANDUM :
Les membres de la plate-forme soumettent aux autorités
publiques les propositions suivantes relatives aux huissiers de
justice et au droit des saisies:
Les huissiers de justice qui procèdent à un recouvrement
amiable de dettes, doivent être soumis à toutes les
dispositions de la loi
du 20 décembre 2002 sur le recouvrement amiable de
dettes du consommateur, à l'exception de l'inscription
obligatoire auprès du SPF Economie. Le respect de cette
loi est contrôlé par la Direction générale
Contrôle et Médiation du SPF Economie.
Le fichier des saisies et les autres dispositions de la loi
du 29 mai 2000 portant création d'un fichier central
des avis de saisie, de délégation, de cession et
de règlement collectif de dettes et modifiant certaines
dispositions du Code judiciaire doivent être mises en place
durgence afin déviter laccumulation de
frais inutiles tant pour le débiteur que pour le créancier.
Par ailleurs, une telle banque de données centralisées
pourrait également être extrêmement utile dun
point de vue statistique (nombre de saisies, nombre de ventes
par les huissiers de justice, ...).
La pratique actuelle qui permet deffectuer des saisies qui
ne rapportent rien, doit être limitée.
Une information claire et obligatoire dans le chef de lhuissier
de justice vis-à-vis du débiteur, relative aux droits
et devoirs de celui-ci, doit être introduite dans la législation.
Un ombudsman ou un service de médiation doit être
mis en place, où tout un chacun pourra s'adresser lorsquil
a des questions et des plaintes concernant des procédures
de saisie.
La liste des biens qui ne peuvent être saisis doit être
adaptée.
[Source du document : ASBL DIGNITAS]
(*) Document Word à télécharger,
116 Ko. loi du 29 mai
2000 (*) portant création d'un fichier central des
avis de saisie, M.B. 9/08/2000
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